Les crises successives de l’UE ont donné naissance à un nouvel impératif de politisation : la codification de l’État de droit et des valeurs démocratiques. Au cours de la dernière décennie, l’activisme de la Commission européenne, les résolutions du PE et les débats portant sur la situation politique dans certains des nouveaux États membres (EM) ont progressivement élargi le champ d’examen de l’UE à un éventail plus large de principes et de valeurs, allant bien au-delà du cadre du mécanisme de l’État de droit (Müller 2015). En enregistrant minutieusement les échecs politiques dans les nouveaux États membres, les institutions européennes ont établi des repères démocratiques implicites et consensuels en tant que correctifs aux dérives politiques. Dans le même temps, sur fond de conflits entre les majorités gouvernementales de certains États membres de l’Est et les institutions de l’UE, une nouvelle forme de souverainisme a émergé, en opposition à l’UE et à ses exigences institutionnelles. Ce conflit a donné aux dirigeants de l’Europe centrale et orientale l’occasion de remettre en question les principes et les significations de l’État de droit et de proposer des conceptions alternatives du rôle de l’UE et de ses principes fondamentaux. Y a-t-il un chevauchement complet aujourd’hui entre le recul démocratique et les attaques contre l’État de droit ? Quels types de régimes conditionnent-ils différentes formes de recul (et pourquoi) ? Quels sont les principaux récits et conflits politiques entourant l’État de droit ? Comment les polarisations politiques locales redéfinissent-elles, déforment ou instrumentalisent-elles les significations de l’État de droit dans les États membres ? La réponse à ces questions sera principalement construite à partir des expériences roumaines durant la période de la post-adhésion.